L’école au Cameroun telle qu’elle va d’année en année: se rend – t – on compte ?

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Existe- t – il une politique de l’éducation au Cameroun? mieux, les gouvernants ont-ils un rêve pour le pays dont ils ont la charge ?

Ces questions peuvent paraitre insensées, voire osées, dès lors qu’on considère comme évident, qu’un pays ne peut envisager son devenir sans que ses dirigeants n’aient des visées dans la formation de ses enfants, visées naturellement portées par les types et la qualité de formation qu’ils mettent en place. L’impertinence de cette question deviendrait plus évidente, lorsqu’on se rappelle qu’une loi, celle de 1998, dite d’orientation de l’éducation au Cameroun, existe justement pour répondre à cette préoccupation.

Seulement, l’observation des faits et des pratiques qui entourent l’éducation, imposent cette préoccupation.

Ces faits qui dérangent.

Si les décennies qui ont suivi notre accession à l’indépendance ont laissé voir, qu’ un établissement scolaire, c’est un cadre avec des infrastructures, répondant aux normes bien définies, pour des missions précises, animé par des personnes plus ou moins formées, mais respectées et respectables, il se trouve malheureusement, qu’au fur et à mesure que notre souveraineté se confirme, ce qui jadis assurait à l’école sa notoriété, s’écroule chaque jour à l’épreuve des égoïsmes, de l’irresponsabilité et de l’immoralité: qui se préoccupe encore des dimensions que doit avoir une salle de classe, une concession scolaire, des différents équipements qu’on doit y trouver, le site même qui doit l’abriter?

Nos décideurs ont – ils à cœur le fait qu’il y a un lien presque étroit, entre la qualité d’Hommes qu’on veut former et le milieu dans lequel ils doivent être formés ?

Quand on connait l’inter action qui existe entre l’Homme et son milieu de vie, peut-on former de grands Esprits, capables de Rêves, dans des milieux étroits et impropres ?

L’article 2 de la loi sus évoquée , souligne:  « l’éducation est une grande priorité nationale. » devant une telle déclaration, que dire, quand on constate que de 2017 à 2021, la part du budget public alloué à l’éducation, est parti de 14,6% à 11,8%(annuaire statistique Minedub/MINESEC 2021) alors même que nous sommes depuis 2015 sous « serment », devant la communauté internationale ,  « serment » prêté lors du forum mondial de l’éducation, où nous avons promis parmi les nations du monde, de porter le financement de l’éducation à au moins 20% du budget Public?

Cela ne suffit – il pas pour s’interroger sur l’existence réelle d’une volonté politique, pour la promotion de l’Éducation de qualité au Cameroun?

Comme il fallait s’y attendre, le budget d’investissement qui devait accompagner notre engagement, a reçu un sérieux coup: déjà insignifiant pour un pays qui nourrit de grandes ambitions, de 5,2% en 2017, il est descendu à 3,8% en 2021 selon la même source. Dès lors, les infrastructures de qualité pour une éducation de qualité, ont déserté l’Esprit de nos décideurs; la qualité est sacrifiée au profit de la quantité. Ce n’est plus à l’École publique qu’il faut chercher la référence; tant mieux pour les Fondateurs privés qui peuvent chacun, au rythme « des gestes généreux », implanter leur « commerce » là où ils veulent, comme ils veulent ; l’égoïsme et la cupidité aidant. A l’École publique, tout là-bas, en dehors de la qualité de certains de ses enseignants et leur niveau de salaire qui fait pâlir d’envie leurs collègues du Privé, réduits pour la plupart, à vivre la forme améliorée de l’esclavage, fonctionne en mode rabais: en 2023, à 12 ans de l’atteinte de l’émergence annoncée en 2035, dans plusieurs coins du pays, les dessous des arbres servent encore de salles de classe et leur feuillage de toiture pour certaines écoles publiques. Ce ne sont pas des tables – bancs qu’il faut chercher, encore moins l’électricité ou de l’eau potables dans ces milieux où les activités académiques sont dictées par le climat. Ailleurs, par des arrangements occultes, étrangers aux exigences de l’éducation, une certaine élite, pour s’assurer de la disponibilité d’un bétail électoral, fait naitre des bâtiments et les enseignants sans élèves. Le plus alarmant, c’est que même les centres urbains sont affectés par ces entraves liées au complot inavoué, ourdi méthodiquement contre la connaissance et pour l’abrutissement des masses. Ici, quand la nature vient à s’y mêler, une forte pluie par exemple, voilà que dans certains quartiers, les salles de classe sont inondées; les enseignants, obligés d’arrêter les cours, deviennent des maitres-nageurs pour sauver les enfants, quand le vent n’a pas emporté la toiture; une toiture amoindrie par le poids de l’âge et la négligence, signe caractéristique des édifices publiques; oublions celles qui sont faites à la hâte, mais dont les prix sont sans rapport avec la qualité. Pendant ce temps, c’est les mêmes programmes, les mêmes contenus partout. Les enfants dont le découpage de l’année scolaire est tributaire de la nature et ceux dont le courant électrique et l’eau potable ne sont pas des biens courants, ont l’informatique et d’autres matières scientifiques au programme; n’allez pas y demander une salle informatique, un laboratoire; à quoi ressemble un ordinateur ou encore un tube à essai. Comme leurs paires des Ecoles dignes de ce nom, ils passent les mêmes testes pour les mêmes diplômes.

« L’année scolaire comporte au moins trente-six semaines de cours effectifs ». Nous informe l’Article 22 de la loi d’orientation de l’éducation du Cameroun. En avons-nous fait en 2022, au regard de la grève des enseignants qui a duré plus d’un mois et les fériés décrétés en faveurs du football, lors de la CAN, consacrant ainsi la suprématie des jeux sur le Travail dans un pays pauvre très endetté?

Et ces pratiques qui gagnent du terrain au détriment de l’éducation de qualité.

Chaque année scolaire, on connait en principe la date du début des cours; mais quand finissent-ils exactement?

Il est constant de remarquer que, malgré les actes formels qui précisent le découpage de l’année scolaire, en l’occurrence son début et sa fin, chaque Établissement y va en fonction des bénéfices financiers qu’il entend réaliser. Par exemples, nos petits tours dans la capitale, nous ont fait constater que certains collèges, relevant d’une confession religieuse de renom, n’ont pas eu de troisième trimestre. Rentrés le 17 avril 2023 pour la reprise, le 14mai 2023, ils ont clôturé l’année avec la remise des bulletins de notes; seuls les élèves des classes d’examens, ont continué à bénéficier des enseignements. Cette tendance qui est générale, est une tricherie qui consiste à faire comme si, les manquements accumulés dans les classes inférieures, pour les mêmes causes, peuvent être comblés dans les classes d’examens et garantir de meilleurs résultats lors des examens certificatifs, résultats devenus les ‘’caches – sexes ‘’, « des masques » qui couvrent toutes les misères que traverse l’éducation. Et les parents d’Élèves?

Bon gré malgré, ils se sont donnés pour seules charges, payer la scolarité et attendre les bons résultats; qu’importe le niveau des acquis. Réduits à chercher le minimum pour vivre, ils ne se sentent ni en droit, ni en devoir d’exiger le service de qualité, ni aux Fondateurs à qui ils versent des sommes considérables, ni à l’État dont la mission est: « L’organisation et le contrôle de l’enseignement à tous les degrés… » (loi 098 portant orientation de l’éducation, art.14). Pour les distraire d’avantage, les taux de réussite surprenants, même pour les correcteurs leurs sont servis. Dans cette ambiance, on comprend pourquoi, l’école à mi-temps, baptisée « double flux », introduite pour répondre à la menace du covid-19, est en passe de devenir normal. D’ailleurs, les propos de Monsieur l’inspecteur coordonnateur général des enseignements au Ministères des Enseignements Secondaires(MINESEC), au cours de « scène de presse », émission à la CRTV, le 04 juin 2023, ont laissé entendre à demi – mots, qu’ au vu des résultats aux examens en leur possession(66,67%) en 2022, ce Système a tout pour demeurer, bien qu’il n’ enrôle que 6% des Établissements et ne concerne que certaines classes que les Proviseurs concernés, se sont donnés la liberté de remplir, malgré l’existence des textes règlementaires, par   « Amour » pour le Cameroun. N’en déplaisent à ses Co panélistes qui essayaient de montrer les limites de cette option, dont la moindre n’est pas son incapacité à permettre la bonne couverture des programmes, quand on fait abstraction de l’injustice qu’il traine pour les apprenants qui en sont soumis, par rapport à leurs camarades du flux normal. En effet, comment peut-on évaluer au même niveau, un enfant qui reçoit 900h de cours par an et celui qui en reçoit à peine 450?

Ce qui échappe à la logique, c’est que tous ces manquements n’ont presque pas d’effets sur la performance des apprenants, si l’on s’en tient aux taux de réussite connus ces dernières années: en 2021, selon les annuaires statistiques du MINEDUB et du MINESEC, la performance la plus basse est celle du Probatoire littéraire qui a été de 53,67%; le BEPC étant l’examen où les élèves ont particulièrement ‘’brillé’’, 89,56%. Les Examens de 2021/2022, année de la CAN et de la grande grève des enseignants, n’ont pas dérogé à cette curiosité: 66,67% selon l’Inspecteur Coordonnateur général des Enseignements à la CRTV, au cours de l’émission citée plus haut.

Seulement, l’annuaire statistique MINESEC 2021, nous signalent les taux d’achèvement au 1er cycle de l’enseignement secondaire général et enseignement secondaire technique professionnel de: 57,69 %, soit un taux d’abandon de 42, 31%. Dès lors, on est en droit de poser la question, qu’est ce qui peut bien pousser tant d’élèves à abandonner en cours de cycle si malgré les vicissitudes qui devraient entraver leur bonne performance, ils donnent des scores largement au-dessus de la moyenne?

Les résultats dont se félicite Monsieur l’Inspecteur coordonnateur, ne sont-ils le fruit de nivellement par le bas?

Et si le taux d’abandon était le reflet de la décrépitude que connait notre système éducatif, pour qui sont ces résultats menteusement corrects qu’on nous sert avec la complicité active des enseignants qui, dans une irresponsabilité honteuse, acceptent de se renier pour des espérances vides, en privilégiant les raisons politiques à la promotion de la connaissance dont ils sont censés être les défenseurs ?

Est-ce que Monsieur l’Inspecteur Coordonnateur général des Enseignements, peut nous exposer le contenu des conciliabules qui entourent les délibérations qui produisent les résultats dont il se réjouit ?

La course vers les profits individuels et les besoins de politiques démagogiques, doivent-ils faire oublier ou minimiser les dangers d’une formation approximatives?

Quel avenir, avec des enfants sous formés, mal évalué(e)s?

Quand on sait, que plusieurs à travers des raccourcis et autres trafics, vont atterrir dans l’enseignement ou dans le secteur de la santé; peut-on imaginer ce qui adviendra?

Que perdront nous de fondamental en faisant exactement ce qu’on doit faire?

De plus en plus, des témoignages alarmistes, effrayants sont faits contre certaines personnes appelées abusivement médecins, mais dont la seule compétence est le diplôme qu’il possède, un diplôme sans aucun rapport avec ce qu’il sait réellement. De l’autre côté, ce sont les établissements scolaires, mieux, les élèves qui font les frais des diplômés sans science ni connaissances. A quand la fin de l’officialisation du politiquement correct, pour laisser place à l’honneur, à la dignité?

L’instrumentalisation des diplômes aux fins de distractions pour détourner l’attention des parents par rapport à l’absences du minimum, pour un bon encadrement des enfants, est un jeu dangereux ; plus couteux que le retour à l’école classique, promotrice de l’ascension sociale.

Ce qui est certain, tous, nous payerons ; nous serons victimes de nos appétits, de nos complicités actives ou passives; nous recevrons le prix de l’éducation au rabais d’une société que nous sommes en train de sacrifier.

Le Président National du SYNTESPRIC

NHYOMOG LUC

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